Contribution
du ME France Section de Cabourg
Réflexions
de la Section avant l'échéance de 2004
PREPARER ACTIVEMENT L'ECHEANCE 2004
L'Annexe du Traité de Nice prévoit,
à la demande de l'Allemagne, un débat citoyen sur l'avenir
de l'UE avant une nouvelle réforme ( via une nouvelle CIG ) qui
porterait sur la délimitation des compétences entre UE
et Etats Nationaux, sur le statut de la Charte des droits, sur la simplification
des Traités, sur le rôle des Parlements nationaux dans
l'UE. Pour entrer dans le vif de ce débat citoyen, notre Mouvement
oriente la réflexion sur " cinq grandes questions "
( en fait, six ) qui couvrent plus encore de sujets. Il ne s'agit pas
de produire une analyse plus ou moins exhaustive ( de nombreux ouvrages
s'y sont déjà employés)mais d'introduire un débat
, dans lequel l'intervenant peut reformuler les questions proposées,
présenter brièvement un point de vue forcément
réducteur mais qui attend d'être comparé à
celui des contradicteurs ; l'intervenant recherche aussi quelles relations
peuvent exister ( condition préalable et situation dans l'échelle
du temps, causalité ou conséquence, hiérarchisation
et dépendance ...) entre les questions posées.
I - " Quelles politiques communes conduire à 27 ? "
Une interprétation restrictive consiste
à entendre " politiques communes " dans le sens de "
politiques communautaires " : les nouveaux arrivants dans l'UE doivent
accepter, et respecter avec d'éventuels aménagements de
calendrier, les acquis communautaires gérés par la
Commission : le marché unique et ses réglementations, la
PAC, ce qui relève du " premier pilier " ; ils pourront
adhérer, sous réserve de respect de ces critères,
à la monnaie unique.
Quelles conséquences cela a-t-il
pour les actions de solidarité envers les régions les moins
développées de l'UE élargie ( soutiens par financements
régionaux, PAC...) ? Quelles conséquences l'élargissement
peut-il avoir sur cet acquis et son indispensable évolution qui
suppose une homogénéisation graduelle des politiques économiques
des Etats, alors que la décision à l'unanimité du
Conseil reste requise dans les domaines concernés les plus importants
: fiscalité, social ...Quelles conséquences pour le citoyen
de L'UE ?
Prenons l'exemple de la politique commune
de redistribution à partir des régions plus riches vers
les régions à produit intérieur moins élevé.
Les pays européens les plus riches font depuis longtemps partie
de L' UE ; l'élargissement fait donc entrer dans l'UE, globalement,
des pays qui ont des besoins de développement (les écarts
de PIB sont impressionnants !), et il suppose donc un effort supplémentaire
et important de redistribution à financer par les pays fondateurs
de l'UE , grosso modo par les Six et la Grande Bretagne, si son
" pragmatisme " ne l'en empêche pas . Le problème
restera difficile à régler, même si on prend les précautions
de l'étaler dans le temps, des exceptions temporaires mais essentielles
étant prévues, par exemple sur la liberté de circulation
des individus. Pourquoi sommes -nous dans cette situation ?
Parce que l'élargissement vers l'Est,
par ailleurs justifié sur la base des critères géographique
et culturel, se fait d'abord sur le critère politique des
relations internationales, dont nous ne maîtrisons pas le calendrier,
tandis que l'UE, dans son acquis communautaire, est d'abord économique.
L'analogie avec le cas de l'Allemagne réunifiée est parlant
: la réunification fut d'abord une décision politique prise
dans l'urgence, comme la décision de parité entre le mark
RFA et le mark RDA ; la très forte solidarité ethnique
entre Allemands résiste mal aux transferts économiques massifs
vers les Landers de l'Est, transferts qui ont d'ailleurs affecté
l'UE dans la mesure où l'économie allemande est la première
de nos économies interdépendantes.
La question de l'intégration des
pays de l'est européen ne nous paraît pas, en première
analyse, dans la situation d'urgence que le chancelier Kohl a dû
traiter dans le cas de l'Allemagne, mais si l'on tient compte des taux
de croissance des PIB nationaux et du temps nécessaire pour résorber
les écarts entre les pays riches et les autres, le problème
demeure, qui peut devenir crucial en période de stagnation ou de
récession économique ; et l'UE ne bénéficie
pas de l'homogénéité ethnique allemande qui faisait
de leur unification un objectif reconnu et constant depuis plus de quarante
ans. En d'autres termes, cet élargissement européen
sera sans doute plus long et plus difficile à réussir que
la réunification allemande. Et la PAC, les politiques sociales
de redistribution, la question démographique, les transferts de
population sont d'autres sujets de préoccupation.
Comment réaliser ce processus nécessaire,
s'il n'existe pas au préalable une forte solidarité entre
les citoyens européens ? L'acceptation de cette solidarité
par l'individu suppose chez lui la conscience d'une composante
européenne de sa citoyenneté. Or, la construction de
l'identité politique du citoyen européen est à
peine commencée, et rencontre des obstacles importants.
2 - " Comment renforcer la place de l'Europe dans le monde ?
"
Comment s'assurer que l'UE, en tant que
telle, puisse réagir sans retard, puisse faire face en " temps
réel " aux événements extérieurs, aux
potentialités ou aux explosions de conflits. Comment assurer que
l'UE affirme sa position, basée sur le droit démocratique
transnational ( ou cosmopolite) pour la paix et le progrès influence
donc les décisions dans les relations internationales, pèse
sur ces évènements à la hauteur de sa démographie,
de ses programmes d'aide, de son ambition démocratique, pour favoriser
et assurer, dans et au-delà de son espace propre, l'environnement
politique et social indispensable au bien - être de ses propres
citoyens ?
Ces actions extérieures à
l'UE restent du domaine intergouvernemental : l'élaboration des
prises de position de l'UE et des actions communes relève de la
négociation entre les Etats de l'UE. Autrement dit, comment avoir
une " politique extérieure " de l'UE si le système
diplomatique, spécificité des relations extérieures,
se perpétue entre les Etats de l'UE : en la matière, les
frontières et les outils restent au niveau des Etats : diplomatie,
représentation internationale, armée.
Dans ce domaine de souveraineté sensible
entre tous, celui des relations extérieures et de la sécurité
internationale, l'influence diplomatique repose certes sur le savoir-faire
des spécialistes, mais l'expertise européenne, reconnue,
devient marginale dans un monde où règne la real politic
si, pour appuyer ses objectifs de paix et de développement, elle
ne s'appuie pas sur sa puissance économique et militaire,
et sur une capacité de réaction efficace aux événements
extérieurs au système européen , encore souvent imprévus
malgré le développement du savoir-faire en matière
de prévention des conflits. Cela nécessite une structure
politique simple qui ait pouvoir de décision, y compris dans les
affaires diplomatiques et militaires.
Cela suppose donc, et plus encore dans ce
cas, que le citoyen ait conscience d'une solidarité européenne
; la solidarité au niveau national l'a souvent conduit au sacrifice
de sa vie ; on peut espérer bien sûr que les conflits resteront
localisés, que, comme on l'a cru déjà en d'autres
temps, il n'y aura plus de guerre européenne, mais ce citoyen pourrait-il
aussi, s'il le fallait, mourir pour l'Union ?La professionnalisation et
la modernisation des armées nationales, la coordination nécessaire
de leurs moyens ne suffiront pas, la nomination d'un secrétariat
à la PESC ne suffira pas, les institutions européennes actuelles
resteront largement inefficaces dans ce domaine !
3 - " Comment améliorer les mécanismes de décision
décidés à Nice ? "
La méthode de la CIG, celle de la
négociation diplomatique, produit des solutions de plus en plus
bancales, complexes, difficiles à mettre en oeuvre et à
faire comprendre. Triple majorité ingérable ( majorité
qualifiée des voix, majorité des pays, majorité démographique
) , domaines cruciaux restant du ressort de l'unanimité, Commission
restant trop dépendante du Conseil européen et pas assez
d'un vrai Parlement.
a ) les " coopérations renforcées
" entre certains pays ( ex " noyau dur " , " avant
- garde ") restent encadrées et bridées. Elles peuvent
être considérées comme des solutions temporaires de
contournement des blocages. Séduisante et perverse, cette approche
pragmatique, qui parie sur l'effet d'entraînement dans le cas de
réussite, relève encore du domaine intergouvernemental ,
des rapports de forces diplomatiquement négociés ; elles
reculent l'avènement d'un espace démocratique européen,
voire peuvent renier les élargissements successifs qui ont été
ou seront ratifiés. La société politique suppose
le vouloir vivre ensemble des membres solidaires, elle ne peut s'assimiler
à un supermarché où on n'achète que ce dont
on a besoin.
Si ces coopérations concernent des
domaines importants ( par exemple : diplomatie et défense) , elles
supposent probablement, soit une extension assez rapide de ce domaine
de coopération aux autres pays, soit l'éclatement de la
communauté. Si elles concernent des domaines limités, elles
peuvent constituer une solution d'urgence ou un champ expérimental
temporaires, mais risquent aussi, par effet de multiplicité et
de dispersion, de dissoudre les chances de réussite de l'unité
européenne.
b ) Faut-il attendre de ceux qui exercent
les responsabilités dans le système existant, basé
sur les Etats nations, qu'ils sacrifient certaines de leurs prérogatives
constitutionnelles ( diplomatie, armée, police, fiscalité,
modèle social ... ) , qu'ils renoncent peu ou prou à la
souveraineté nationale, qu'ils ont juré de défendre,
au profit d'un système européen ? Faut-il attendre des ministres
des Affaires étrangères et des ambassadeurs qu'ils se fassent
hara-kiri ? Un seul ministre des AE de l'UE suffirait, et quinze ( ou
plus ) ministres délégués ; une seule promotion comme
ambassadeur de l'UE, et quatorze ou vingt-six anciens ambassadeurs reconvertis
en attachés.
L'action politique est souvent affaire d'experts,
qu'il ne s'agit pas d'écarter, mais il ne faut pas non plus qu'ils
soient abandonnés à leur expertise. Les responsables
politiques doivent se rappeler que la référence à
la souveraineté des citoyens n'est pas un exercice de style, que
le passage devant le suffrage populaire ne se traite pas que par l'expertise
dans le discours politique.
c ) Un retour aux principes de la démocratie,
essence de l'UE, peut être utile : le peuple est souverain et tout
pouvoir politique émane de lui.
Il peut ainsi paraître préférable
au citoyen que la Commission évolue vers un Gouvernement responsable
devant le Parlement Européen dans certains domaines où
ce citoyen voit son intérêt à européaniser
la structure étatique. Il peut paraître préférable
au citoyen d'avoir un système politique plus clair, dans lequel
il délègue, par un vote majoritaire, des pouvoirs démocratiques
à une représentation européenne qui exerce le pouvoir
conjoncturel de décision dans l'intérêt général,
vienne lui rendre directement et périodiquement des comptes , et
lui proposer des programmes concurrents. Quand il est mieux défendu
au niveau européen ( enjeux économiques et commerciaux,
politique internationale, sécurité et défense, environnement...),
au moindre coût ( économique mais pas seulement), le citoyen
peut voter en faveur d'une représentation politique européenne..
Des principes à la réalité,
le fossé est large, mais ou bien on peut croire à la réanimation
de la vie démocratique, ou bien on risque de sortir du véritable
régime démocratique : il faut donc remotiver le citoyen,
lui faire des propositions, puis lui demander ce qu'il veut.
La première proposition de ce triptyque,
la motivation publique, préalable démocratique dont on veut
qu'il aille sans dire ( réveiller le peuple , considéré
encore, in petto, comme incapable de discernement et en tous cas
comme imprévisible, serait dangereux ) est peut-être la phase
la plus difficile à réaliser. Dans un monde très
individualiste où les structures politiques se sont dévaluées
par défaut d'adaptation aux réalités , le balancier
de l'individu -citoyen, " bonheur privé - action publique
" penche trop vers les projets personnels au détriment de
la vie politique.
Peut-on motiver en dehors des périodes
de risques catastrophiques pour la sécurité des personnes
et des biens ? Si l'objectif est bien d'assurer le bien-être
dans une paix durable ( ce que l'Europe a globalement trouvé pour
la première fois dans la seconde partie du xxième siècle,
en particulier après la guerre froide cela doit être possible,
ou bien, encore une fois, on change de régime politique, donc on
abandonne un fondement principal de L'UE.
Interrogé récemment sur ce
qui était important dans la vie politique mondiale ( qui influence
aujourd'hui la vie du moindre village français ) , un ministre
français, parmi les premiers et, à juste titre, des plus
écoutés, a répondu à peu près : "
le représentant des Etats -Unis , ensuite les présidents
ou chefs de gouvernement de quelques pays, en dessous quelques ministres,
et c'est à peu près tout " . " Mais qu'en est-il
des peuples ? " , lui demande -t-on ? " L'opinion des peuples
peut intervenir dans l'évolution des choses, mais épisodiquement
et très marginalement " Réponse d 'expert ! "
Charger les préfets de la République
d'organiser , d'encadrer le débat-citoyen ne paraît pas de
très bonne augure. C'est la sensibilisation de l'opinion par les
" mouvements européens " qui devrait être , dans
l'intérêt général, considérée
comme une opération de salut public. Dans ce cadre, et si l'on
peut user ici des termes de marketing, le message devrait sans doute être
plus orienté sur la cible, c'est-à-dire le citoyen contemporain,
caractérisé par son individualisme : une diplomatie et une
armée européennes présenteront un meilleur rapport
bénéfices/coût pour ce citoyen ; de même de
la sécurité intérieure, de l'organisation des institutions.
Enfin, cette action ne peut être efficace que si les moyens de transmission
du message fonctionnent correctement. Dans ce domaine, on pourrait rêver
qu'une règle de bonne conduite, sorte de Charte de l'audio-visuel,
soit adoptée au niveau européen.
Les mécanismes de décision
( " de Nice " mais aussi de l'UE en général) seraient
plus compréhensibles, plus rapides et plus efficaces si le processus
de décision démocratique non seulement admis par les pays
mais exigé dans la vie politique de tous les membres, remplaçait
plus souvent le processus de la négociation-consensus pratiqué
dans la CIG et en général par le Conseil. L'impulsion pour
ce changement doit venir du citoyen qu'il faut motiver.
4 - Charte des droits et projet de Constitution.
a) " Pour Jean-Louis Bianco, inutile
de mettre la charrue avant les bufs. Il rejoint en cela Pascal Lamy,
qui ironisait lors d'un colloque récent sur les " défilés
de haute couture institutionnelle ". De l'avis du Commissaire au
Commerce, en effet, les institutions sont faites " pour servir des
projets, et c'est sur le projet politique qu'il faut d'abord travailler
".
Les responsables français, avec des
exceptions notables, sont plutôt contre une Constitution européenne
; les responsables allemands sont plutôt pour, mais ne reçoivent
guère de réponses de leur partenaire privilégié
: le tandem franco-allemand est en panne, malgré les relances répétées
venues d'outre - Rhin.
Pourtant, il n'est pas question de faire
" du passé, table rase " mais de réformer dans
la matière constitutionnelle avec beaucoup de précaution.
Il n'est pas étonnant que l'inertie
vienne de l'Etat nation le plus " idéal-typique ", le
plus centralisateur ; les français semblent avoir toujours voulu
l'Europe pour leplus grand profit de la France, et non pas pour l'Europe
elle-même. Les autres aussi, dira-t-on, ne pensent qu'à leur
intérêt ( on cite alors l'exemple anglais ). La réponse
dénote l'état d'esprit : on se situe dans un contexte
de relations internationales, régi par " l'état de
nature " , rapport de forces camouflé derrière les
Conventions et adouci par le développement du droit international
et la couverture médiatique. A l'heure de Bilan de la CIG, moderne
bataille entre civilisés, il s'agit de voir quel pays, quel général-négociateur
a gagné, et lequel a perdu (gagnant-perdant). Il ne s'agit que
trop peu de gagner ensemble ( gagnant-gagnant ), et la coopération
n'avance souvent que face aux contraintes extérieures pour éviter
qu'il n'y ait que des perdants (perdants-perdants) ? Or, ces contraintes
deviennent de plus en plus fortes : la société civile s'adapte,
les Etats renâclent et s'accrochent à leur culture , à
leur système traditionnel.
Promouvoir une Constitution européenne
est un pas décisif vers un certain fédéralisme, qui
s'inscrirait au détriment du processus intergouvernemental, et,
croit-on faussement, au détriment de l'intérêt des
nations. Ainsi la Charte des droits reste une déclaration non contraignante
qui ne relève que du droit et de l'éthique internationale.
b) En fait, il n'est que temps de travailler
à l'élaboration d'une Constitution européenne, qui
formalise ce qui nous rassemble, en commençant par les droits de
l'homme et les devoirs du citoyen . Ce texte , concrétisation du
changement de perspective , sera une re-fondation de l'Union parce qu'il
se substituera aux traités européens signé entre
les Nations ; il sera évolutif, procédant par additions
au fur et à mesure que le " commun ", le partagé
croîtra entre nos pays. Comme le développe Jean-Marc Ferry
dans un récent ouvrage, les éléments constitutifs
d'un Etat européen, et même d'un patriotisme européen,
existent, à la fois géographique, juridique, historique,
et constitutionnel.
Cette élaboration paraît être
concomitante et indissociable de deux autres processus :
- la définition, sur la base du principe
de subsidiarité, des domaines politiques qu'il est préférable
pour le citoyen de traiter au niveau européen.
- L'évolution des structures actuelles
vers la démocratisation : une Commission visible dont il faudra
étendre les prérogatives, sous le contrôle du Parlement
Européen, celui-ci étant rendu plus représentatif
par la réforme des élections européennes au scrutin
nominatif par circonscription. Il y faudra sans doute des partis politiques
transnationaux parallèles aux partis nationaux, et proposant des
programmes de législature, y compris en ce qui concerne l'aspect
constituant.
Cette disposition, qui remplacerait le scrutin
national par liste actuelle qui envoie des élus à Strasbourg
où ils se regroupent, assurerait une plus grande légitimité
des élus et contribuerait au développement de la conscience
européenne du citoyen. Evidemment, il faut commencer par ce
dernier point, la remontée de la légitimité étant
conditionnée par la participation électorale.
La notion de " gouvernance " s'est
étendue récemment aux relations internationales : les analystes
nous disent ainsi que les instances politiques (Etat, organisations intergouvernementales)
ne détiennent plus le monopole de la conduite des affaires publiques,
et doivent quelque peu partager le pouvoir avec des organisations privées,
des associations, des ONG, des réseaux formalisés ou non.
Cette tendance sera d'autant plus forte que la légitimité
des instances politiques existantes sera plus faible, mais il s'agit de
réformer ces dernières et non de leur substituer une démocratie
des lobbies, qui manque de transparence et ne peut donc se substituer
à la voie démocratique, mais qui peut garder un effet positif
dans un cadre démocratique renforcé.
5 - " Comment rapprocher l'Europe du citoyen européen ? "
Cette question semble avoir trouvé
sa réponse dans la réflexion sur les questions précédentes.
La méthode intergouvernementale, les conciliabules diplomatiques,
héritage précieux, perfectionné au cours de nos expériences
historiques, paraissent légitimes dans notre Europe de nations.
Mais ils figent et perpétuent cette Europe dans des domaines où
la référence de la citoyenneté doit s'élargir
à l'UE. L'action politique ne peut être totalement publique,
les experts ont leur place, mais les représentants des citoyens
ne peuvent être vraiment légitimes, et efficaces pour traiter
certaines affaires européennes, que s'ils émanent d'un
processus démocratique au niveau européen.
Dire que la société est complexe,
affaire d'experts , trop difficile pour être expliquée facilement
ne démontrerait que l'échec de la vocation du politique
: il est en effet essentiellement de sa responsabilité de traduire
cette complexité en termes et options politiques clairs. Il y faudra
du temps, et une action vigoureuse de la société civile.
Pour que l'élargissement soit un
succès, pour que la réforme institutionnelle indispensable
aboutisse, pour que l'UE tienne sa place dans les relations internationales,
le débat citoyen ne peut rester un accessoire à vocation
consultative, une couverture démocratique qui donne bonne conscience
aux conservateurs partisans du statu quo en faveur de la négociation
intergouvernementale. Ce débat est un préalable essentiel
ouvrant la voie vers la prise de conscience par l'individu d'une citoyenneté
européenne plus étendue, qui peut être forte s'il
comprend que solidarité européenne et intérêt
individuel ne s'opposent pas mais se rejoignent, qui établisse
la confiance et la volonté de vivre ensemble.
Le débat est donc inséparable
de l'avènement de la société civile transnationale
qui seule peut conduire à la constitution légitime d'institutions
européennes claires et efficaces, cadre démocratique de
résolution de questions pour lesquelles le citoyen aura décidé
qu'il est de son intérêt quelles soient traitées au
niveau européen.
Rendez l'Europe au citoyen européen !
Le
17 avril 2001
Rapporteur : Philippe Douvrin
Mouvement Européen - France , Section de Cabourg
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